En octobre 1934, Dali et Gala se sont rendus à Barcelone où Dali devait donner une conférence. Se retrouvant pris dans une grève générale et un soulèvement armé des séparatistes catalans, le couple a été obligé de fuir immédiatement. Ils sont arrivés à Paris sains et saufs de justesse : le chauffeur qui les avait amenés jusqu'à la frontière a été tué à son retour. Dali a senti dans ces événements " l'approche du grand cannibalisme armé de notre histoire, celle de notre guerre civile à venir ".
Cette grande toile commencée à Paris exprime sa vision du carnage et de la destruction qu'il anticipait. " J'ai montré un vaste corps humain éclatant en excroissances monstrueuses de bras et de jambes se déchirant les uns les autres dans un délire d'autostrangulation. À l'arrière-plan de cette architecture de chair frénétique dévorée par un cataclysme narcissique et biologique, j'ai peint un paysage géologique qui avait été inutilement révolutionné pur des milliers d'années, figé dans son 'cours normal'. La structure molle de cette grande masse de chair en guerre civile, je l'enjolivais de quelques haricots bouillis, car on ne pourrait imaginer avaler toute cette viande inconsciente sans la présente (aussi peu inspirante soit-elle de quelques farineux et mélancoliques légumes " .
La présence des haricots renvoie à l'identification dalinienne entre le très réel et l'éminent comestible, thème qui ha te toute son œuvre. Ce motif montre aussi à quel point la guerre civile était liée dans l'esprit du peintre à la nourriture et à l'amour : l'association guerre-nourriture-amour est le thème central d'un tableau apparent, Cannibalisme de l'automne.