La Romance du vin
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La Romance du vin


Tout se mêle en un vif éclat de gaité verte.

Ô le beau soir de mai! Tous les oiseaux en choeur,

Ainsi que les espoirs naguère à mon coeur,

Modulent leur prélude à ma croisée ouverte.


Ô le beau soir de mai! le joyeux soir de mai!

Un orgue au loin éclate en froides mélopées;

Et les rayons, ainsi que de pourpres épées,

Percent le coeur du jour qui se meurt parfumé.


Je sis gai! je suis gai! Dans le cristal qui chante,

Verse, verse le vin! verse encore et toujours,

Que je puisse oublier la tristesse des jours,

Dans le dédain que j'ai de la foule méchante!


Je suis gai! je suis gai! Vive le vin et l'Art!...

J'ai le rêve de faire aussi des vers célèbres,

Des vers qui gémiront les musiques funèbres

Des vents d'automne au loin passant dans le brouillard.


C'est le règne du rire amer et de la rage

De se savoir poète et l'objet du mépris,

De se savoir un coeur et de n'être compris

Que par le clair de lune et les grands soirs d'orage!


Femmes! je bois à vous qui riez du chemin

Où l'idéal m'appelle en ouvrant ses bras roses;

Je bois à vous surtout, hommes aux fronts moroses

Qui dédaignez ma vie et repoussez ma main!


Pendant que tout l'azur s'étoile dans la gloire,

Et qu'un hymne s'entonne au renouveau doré,

Sur le jour expirant je n'ai donc pas pleuré,

Moi qui marche à tâtons dans ma jeunesse noire!


Je sis gai! je suis gai! Vive le soir de mai!

Je suis follement gai, sans être pourtant ivre!...

Serait-ce que je suis enfin heureux de vivre;

Enfin mon coeur est-il guéri d'avoir aimé?


Les cloches ont chanté; le vent du soir odore...

Et pendant que le vin ruisselle à joyeux flots,

Je suis gai, si gai, dans mon rire sonore,

Oh! si gai, que j'ai peur d'éclater en sanglots!






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