Le 13 septembre 2000
Quand Richard Cocciante revient sur l'incroyable aventure de Notre-Dame de Paris, il met d'abord l'accent sur sa fierté d'avoir écrit une oeuvre populaire comme l'ont été dans un autre siècle les opéras. Hier soir, au Zénith de Nancy, le public était de nouveau présent pour cette fresque dont le thème a été emprunté à un chef d'oeuvre de Victor Hugo. Un peu plus de 3.000 personnes se sont enthousiasmées aux pas de deux d'une Esmaralda plus troublante que jamais. Pour sa nouvelle saison, la comédie musicale a légèrement évolué. Comme c'est le cas avec la version londonienne, à l'affiche pour de longues semaines encore du Dominion Theater de Londres, certaines parties ont été revues, l'action resserrée et l'ordre de plusieurs chansons inversé.
Succession assurée
Des retouches de détail qui, si elles ont apporté un petit plus, de l'avis général, n'ont pas transformé Notre-Dame. La magie de cette histoire où toutes les passions s'entremêlent, continue d'opérer. La nouvelle distribution est excellente. La troupe des successeurs de Garou, Hélène Ségara, Bruno Pelletier, Daniel Lavoie assure, sans faux pas, la double et difficile tâche du chant et de la comédie. Sans jamais copier, mais en installant leurs personnalités, Corinne Zarzour, Michel Cerroni, Roddy Julienne, Veronica Antico et les autres parviennent à faire oublier leurs dévorants prédécesseurs. La preuve, au passage, que l'immense succès de cet opéra contemporain doit beaucoup à la richesse de son livret, à des chansons passées depuis longtemps à la postérité comme Le temps des cathédrales, Belle et Vivre. Impressionnant autant que touchant, Mario Pelchat dans la défroque douloureuse de Quasimodo fait une entrée remarquable sur scène. Dans une ambiance de fête des fous, héritée directement du Moyen-Age, la chorégraphie, autour de lui, s'emballe sur des tressautements hip-hop. Du premier au dernier acte, la gestuelle déployée ne manque pas d'impressionner, qu'elle restitue, avec une économie d'accessoires, l'ambiance d'une rue ou celle d'un cabaret glamour, sinon érotique. Alors, des brûlots, quelques barrières métalliques suffisent tant le ballet sait se faire suggestif.
Entre rock et orient
Par instant, l'action se reserre sur tel ou tel personnage principal, un moment d'effusion entre Phoebus et Esmeralda, les échanges violents opposant Frolo au bossu de Notre Dame. Derrière, le mur qui fait office de décor principal, se transforme par un simple jeu des projecteurs, le déplacement d'un élément, en intérieur d'une cathédrale, en place forte baroque ou encore en une de ces barres de béton posées sur nos architectures modernes. L'intensité du parterre se concentre sur cette débauche où des mondes toujours connotés se percutent pour finir par se confondre. Sur des histoires d'amour portées à l'éternité par la littérature, les auteurs ont plaqué des histoires de ce temps, celles des sans papiers, par exemple. La partition pour accompagner cette épopée sait, avec un même bonheur, balancer entre rock et orient, remettre au goût du jour certaines dominantes flamenco. Une fois de plus, le public a fini debout pour reprendre en choeur Le temps des cathédrales... une tradition désormais !