Ce tableau est l'un des premiers exécutés entre 1932 et
1935 où, comme cela avait été le cas pour la légende de Guillaume Tell ,
L'Angélus de Millet était mêlé aux obsessions personnelles de l'artiste tout en
fournissant un support pour l'exploration de ces obsessions. Par le biais de
l'association paranoïaque-critique, Dali interprète le tableau de Millet et lui
donne un sens irrationnel de façon analogue à la formation de l'hallucination
chez les paranoïaques. L'obsession de Dali pour L'Angélus remonte à
l'enfance. Une copie du tableau était accrochée dans le couloir qui menait à
la salle de classe et il a décrit ce que l'oeuvre produisait : d' "obscures
angoisses, si poignantes que le souvenir de ces deux silhouettes immobiles
m'a poursuivi pendant plusieurs années avec le constant malaise provoqué
par leur présence continuelle et ambiguë". Dali attribuait la cause de sa
névrose sexuelle au "faux souvenir" d'un acte de fellation qui impliquait sa
mère. Cette angoisse est présente dans Méditation sur la harpe.
Dali montre le couple de paysans enlacés, la femme nue, l'homme tenant son chapeau de
manière à dissimuler tout en révélant ce que Dali identifiait comme un état
d'érection. Une troisième figure vêtue de noir occupe le premier plan, le
coude se prolongant dans une forme où on distingue le rictus d'un crâne
anamorphosé. En termes psychanalytiques, les dents sont un symbole lié au
sexe et cette protubérance évoque également un "déplacement" du phallus
du paysan. Freud décrivait le déplacement comme un des mécanismes du
rêve destiné à transposer des idées pertubantes sous une forme inoffensive.
L'excroissance du coude fait donc s'apparenter le sexe et la mort, ce que
vient confirmer le soutien de la béquille, symbole dalinien de la mort et de la
résurrection.