Site hosted by Angelfire.com: Build your free website today!
  Confidentiel
code: CEIT-3740 08a2

À l'usage des
services internes
exclusivement

Mémoire sur la
bataille de Stella-6

 

La bataille de Stella-6 s'est déroulée il y a maintenant plus d'un an. Elle a opposé le croiseur lourd Vaudreuil à une force composite mandatée par le Conseil Universel pour mettre en place un blocus de l'astéroïde Thémis, où la Société Universelle des Métaux et Alliages extrait un lithium d'une qualité exceptionnelle depuis environ cinq ans, suite à un accord de participation conclu avec le Ministère des ressources spatiales.

Il convient ici de réaliser un court rappel des événements qui ont mené à cette action militaire. L'étoile Stella-6, une rouge orangée de type M2 V, est située à 24 années-lumière du Soleil, dans une zone difficile d'accès. Elle occupe le sixième rang dans le Nouveau catalogue des ressources stellaires. Elle porte aussi le nom de w1 du Grand chien dans le Grand répertoire des objets célestes. Bien qu'elle soit connue depuis plusieurs siècles, elle n'a été visitée pour la première fois qu'en 3677, par une équipe d'explorateurs mandatée par une compagnie japonaise. La conclusion de cette expédition initiale a été que ce petit système, comprenant cinq planètes et deux ceintures d'astéroïdes significatives, ne disposait pas de ressources suffisamment importantes pour en justifier l'exploitation. Cependant, d'autres petits voyages d'exploration, organisés par divers pays, s'y sont périodiquement succédés jusqu'à tout récemment.

Entre temps, la souveraineté de Stella-6 a été attribuée à l'Union Centrafricaine par le Conseil Universel, sans condition et avec l'accord de tous. Ayant déclaré sa nouvelle possession "zone ouverte", l'Union Centrafricaine a ainsi permis la poursuite des explorations. Une des dernières à avoir eu lieu a été effectuée sous la direction du Ministère des ressources spatiales. Elle avait été tenue secrète et s'était déroulée sur six semaines, en 3731. C'est à ce moment que les richesses de Thémis ont été découvertes. Immédiatement, des émissaires de notre Gouvernement ont entrepris des négociations avec l'Union Centrafricaine, qui ne dispose pas des moyens nécessaires à l'exploitation des gisements de cet astéroïde. Un traité bilatéral a été conclu l'année suivante - il y a maintenant huit ans - à l'insu du Conseil Universel, qui s'y serait de toute façon opposé, selon son habitude. En échange d'un accord militaire (spatial) et de 17% des bénéfices engendrés par son exploitation, l'Union Centrafricaine nous a cédé la souveraineté de Stella-6.


1


 

La suite de l'histoire est simple : la Société Universelle des Métaux et Alliages (S.U.M.A.) a commencé aussitôt à y monter ses installations, et le premier cargo chargé de lithium a atteint la Terre au début de 3735. Lorsque le Conseil Universel a découvert l'affaire, il y a trois ans, il a aussitôt contesté la validité du traité de 3732, puis il l'a ensuite déclaré illégal et sans valeur, malgré les protestations de l'Union Centrafricaine. Devant l'échec des négociations avec notre Gouvernement en vue d'abroger l'acte de cession, le Conseil Universel a exigé le démantèlement de l'usine d'extraction de la S.U.M.A., à défaut de quoi une force spatiale conjointe serait envoyée à Stella-6 pour empêcher toute nouvelle livraison de lithium de Thémis. Notre Gouvernement refusant d'abandonner sa colonie légitime, des vaisseaux mandatés par la Force de maintient de la paix du Conseil prirent sur-le-champ le chemin de l'étoile. Au même moment, notre Gouvernement décidait d'affirmer sa souveraineté sur son système en y détachant un puissant vaisseau de guerre.

Le seul vaisseau immédiatement disponible était le Vaudreuil, en relâche à notre base lunaire. Ce croiseur lourd, un des deux de la classe 3730 entrés en service que depuis 3737, compte parmi les plus redoutés du monde. Son armement principal est constitué de six tourelles abritant chacune trois canons de 20 cm/50 cal. - catapultant des obus de 125 kilos à 270 km/s - et de quatre silos de lancement de torpilles de 105 cm. Il dispose d'un très puissant armement défensif, et ses moteurs thermonucléaires dernier cri peuvent le propulser à une vitesse de près de 2 000 kilomètres par seconde en une minute. En outre, avec près de 17 kilotonnes de blindages composites et un déplacement de bataille de plus de 59 kilotonnes, il constitue une menace même pour les puissants vaisseaux de ligne. Les préparatifs de départ ont été terminés dès le 17 septembre, soit moins de trois jours après l'échec des négociations.

Pour se rendre jusqu'à la zone d'arrivée de Stella-6, le Vaudreuil n'a eu besoin que de trois téléports, effectuant une première étape à Sirius, puis une deuxième dans l'espace intersidéral.

* * *

La force chargée d'appliquer la résolution du Conseil Universel était commandée par un amiral français qui cherchait le plus possible à faciliter une solution pacifique. Dès son arrivée, le 16 septembre, l'amiral Dupont-Deberrans avait donné son assurance aux employés du complexe de Thémis qu'il ne chercherait en aucun cas à les brutaliser ou à


2


 

empêcher leur ravitaillement, s'ils montraient de la bonne volonté. Il avait divisé sa force de six vaisseaux en deux flottilles, formées chacune d'un croiseur et de deux destroyers, dans le but de couvrir une plus vaste partie du système de ses instruments de détection.

Dans l'heure qui a précédé le dernier téléport du Vaudreuil, celui qui le menait à une des aires spéciales d'arrivée de Stella-6 - prévues pour les vaisseaux militaires -, une suite d'événements est venue bouleverser de façon irréparable le cours de la mission confiée à son commandant, le capitaine Landry-Justin.

Tout d'abord, soulignons que la règle exige - avec raison - que le lieu d'arrivée de tout vaisseau soit inspecté durant un minimum de quinze minutes avant que les étapes ultérieures du téléport soient entamées. Quinze minutes de balayage exploratoire avec deux sondes militaires sont suffisantes pour obtenir une représentation détaillée de l'état du lieu d'arrivée dans un rayon de 500 000 kilomètres environ. La circulation de tous les objets (débris, météorites, comètes, astéroïdes, mais aussi les autres vaisseaux) est alors consignée et retransmise à l'équipage du vaisseau en attente, lors de la récupération des sondes. Le commandant peut alors déterminer avec exactitude les risques encourus, et de cette manière il peut choisir la zone d'arrivée la plus sécuritaire, ou même annuler les procédures de téléport, si nécessaire. Cette dernière option n'était toutefois pas envisageable pour le capitaine Landry-Justin, puisque pour remplir sa mission, il devait obligatoirement se rendre à Stella-6. De toute façon, la position du Vaudreuil, au beau milieu de l'espace intersidéral, ne lui permettait pas de rester inactif : une étape dans l'espace intersidéral est une manoeuvre d'exception, qui n'est employée que comme raccourci dans les cas d'urgence grave. Inutile de rappeler que dans l'espace intersidéral, il existe une foule de dangers, qui peuvent se concrétiser à tout moment et avoir des conséquences dramatiques pour les vaisseaux et leurs équipages.

C'est dans ces circonstances que sont apparues les deux sondes envoyées par le capitaine Landry-Justin pour contrôler la zone d'arrivée qu'il voulait utiliser. Or, la flottille "B" de la Force de maintient de la paix croisait justement à peu de distance de là. Elle était composée du croiseur russe Omsk, du destroyer français Éridan et du destroyer indien Shiva. La flottille "A", sous le commandement direct de l'amiral Dupont-Deberrans, se trouvait alors pratiquement à l'opposé du système solaire, à plus de deux cents cinquante millions de kilomètres.


3


 

Les perturbations gravitationnelles et électromagnétiques engendrées par l'apparition des deux objets ont été détectées et analysées en quelques instants par les vigies des vaisseaux de la flottille "B". Il ne fait pas de doute que le capitaine Saranilov, commandant du croiseur Omsk à la tête de cette flottille, a rapidement obtenu la confirmation de l'identification de ces deux objets comme étant des sondes militaires de notre flotte. Nos engins sont relativement faciles à reconnaître par des moyens optiques, à cause des détails caractéristiques de leur apparence.

Le capitaine Saranilov a immédiatement mis sa flottille en état d'alerte maximale, en prévision de l'arrivée imminente de vaisseaux de guerre qui ne pouvaient qu'être destinés à défier la Force de maintient de la paix. En donnant les ordres pour que ses trois vaisseaux quittent le mode furtif complet, le commandant de la flottille "B" a fait envoyer un message codé informant l'amiral Dupont-Deberrans des événements. Mais par le fait même, il a livré beaucoup d'informations aux sondes, entre autre sa position. De plus, cette émission a pu être capté par les récepteurs de la base de Thémis. Ne pouvant déchiffrer le message, mais comprenant qu'il se passait quelque chose d'important, les officiers de la base, reprenant du courage, ont décidé de briser l'interdiction qui leur avait été faite et ont fait remettre en marche tous leurs appareils de communication. Aussi, lorsque les sondes ont envoyé les signaux de reconnaissance de routine à Thémis, par l'entremise de leurs émetteurs spéciaux, ils ont pu être reçus. Selon le rapport du commandant de la base, « la réception de ces émissions en provenance de deux de nos sondes a provoqué un vent de liesse parmi le personnel ».

Au lieu de faire retourner les signaux habituels, les officiers de la base ont fait transmettre aux sondes tous les renseignements dont ils disposaient sur la flotte de la Force de maintient de la paix, notamment sur le nombre, le type et la trajectoire des vaisseaux. Bien sûr, dès que les antennes de la base se sont mises à émettre, leurs signaux ont été captés par les vaisseaux du capitaine Saranilov. Ce dernier, selon nos sources, a été outré de cette violation des conditions de blocus, et a immédiatement fait mettre en marche tous ses appareils de brouillage. Mais l'essentiel de l'information était déjà emmagasiné dans la mémoire des sondes. Saranilov, mal informé, a cru qu'il s'agissait d'une manoeuvre planifiée, faisant partie intégrante d'un plan destiné à faire tomber les vaisseaux de la Force dans un guet-apens, pour qu'ensuite ils puissent servir de monnaie d'échange dans un règlement de la crise au désavantage du Conseil Universel. Il a alors fait envoyer un message à l'amiral Dupont-Deberrans dans lequel il lui rapportait les faits nouveaux et lui exposait sa théorie, en demandant quelles devraient être les représailles contre la base de Thémis. De plus, il a


4


 

envoyé un autre message, spécifiquement pour les sondes cette fois, indiquant que toute arrivée de vaisseau militaire non autorisée par la Force de maintient de la paix dans le système de Stella-6 était formellement prohibée et serait considérée comme un acte d'agression.

Mais compte tenu de la distance séparant la flottille "B" de la flottille "A", Saranilov n'était pas près de recevoir une réponse : il fallait compter une demie heure au bas mot avant que les ondes puissent la parcourir aller-retour. Cependant, peu après l'envoi de ces messages, les deux sondes, ayant terminé leur mission, ont quitté Stella-6. Près de vingt minutes s'étaient écoulées depuis leur arrivée. Saranilov, décidé à ne laisser aucune chance de réussite au soi-disant complot, a donné l'ordre à ses vaisseaux de mettre le cap vers la position consignée des sondes, pour intercepter quiconque oserait emprunter cette zone d'arrivée présumée. Moins d'une minute plus tard, les trois vaisseaux se sont élancés simultanément dans cette direction, avec toute la puissance de leurs moteurs thermonucléaires. Dans l'esprit du capitaine russe, il n'y avait pas de doute que la bagarre était à prévoir. La configuration des feux de signalisation des bâtiments de la flottille "B" était claire : vaisseaux militaires en opération de blocus commandé, prêts à faire feu contre tout antagoniste.

* * *

Selon les témoignages recueillis auprès du personnel de la passerelle du Vaudreuil, le capitaine Landry-Justin a été très irrité d'apprendre que des vaisseaux du C. U. aient déjà mis en place le blocus de Thémis. Il en fait d'ailleurs mention dans son rapport. Il semble même qu'il soit devenu furieux après avoir pris connaissance du message du capitaine Saranilov. Il écrit que « (...) cet acte constitue une atteinte inacceptable au droit spatial universel en général et à la souveraineté de notre nation en particulier, qui se trouve bafouée de la manière la plus abjecte. En outre, l'officier en question n'a pas l'autorité ni la légitimité requise et, dans les circonstances, outrepasse largement le mandat qui lui a été conféré par son officier supérieur et la Force de maintient de la paix. » Après avoir brièvement consulté ses subordonnés, le capitaine Landry-Justin a résolu de poursuivre sa mission coûte que coûte. Le temps de terminer la récupération des sondes, de charger les supracumula- teurs et de permettre à l'équipage de gagner ses incubateurs pour y être plongé en catalepsie, et le Vaudreuil effectuait un nouveau téléport, destiné cette fois à le faire apparaître dans la zone spéciale d'arrivée numéro 1 de Stella-6. Les systèmes automatisés du vaisseau avaient reçu l'ordre d'enclencher, dès que le processus de rematérialisation serait complété, les procédures d'alerte générale, et le branle bas de combat.


5


 


À suivre...


Retour à  FICTION FANTASTIQUE .



Le Relais
Membre du Relais