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PAIX

 

I. Une scène touchante

  • Le choix des personnages : le saint et un enfant.
  • La narration, qui encadre le tableau central et le met, bien sûr, en valeur, mais qui permet aussi de l'amener (gradation) et de ménager tous les effets du texte, y compris les émotions (théophanie).
  • Le cadre : après Complies, la nuit, le petit bois et la cellule : un nocturne lyrique…
  • L'art des détails : les lits de camp, les deux cordes nouées, la porte ouverte, la misérable cellule, le corps gisant, il le porte dans ses bras ; aucun n'est inutile, tous concourent à l'émotion et à la fraîcheur du texte.
  • Les sentiments : la curiosité espiègle, déjouée sans succès par le saint, "il la dénoua si doucement","plein de compassion", regard franciscain sur l'Autre.

II Un palimpseste

  • La Transfiguration : mais c'est le saint qui est au centre, et ceux qui l'entourent sont des personnages néotestamentaires, dimension hagiographique évidente.
  • L'enfant s'évanouit, mais jeu et clin d'œil textuel, cela prépare la suite narrative de l'épisode.
  • Le silence demandé et gardé.
  • Le Corps Mystique : composé des figures les plus vénérées des franciscains : le Christ, bien sûr, mais aussi et surtout la Vierge Marie, dont la dévotion a connu une recrudescence au Moyen-Age, ainsi que saint Jean Baptiste, et saint Jean l'Evangéliste, deux personnages proches, par leurs écrits ou actes, de l'esprit franciscain : conversion du cœur par l'Esprit Saint.
  • Le bon Berger : dans une logique toute textuelle : François comme figure christique.
  • Jeu de réécriture qui hausse symboliquement ce chapitre au niveau de son modèle : le témoignage évangélique.

III Dimension apologétique

  • La vraisemblance est ménagée dans le fonctionnement même du texte : enfant "très pur et innocent", témoin, comme les apôtres, et garant de la véracité de l'épisode.
  • Les effets sur le protagoniste : il devient "un religieux éminent".
  • Les conditions de la croissance spirituelle : "Viens, et vois", Jean, I,46 ; puis "la grâce de Dieu et […] la dévotion de saint François" font le reste.
  • Contraste : la Lumière dans les ténèbres, symbole non seulement de la Vérité et de la présence divine, mais aussi de l'illumination intérieure par l'Esprit, si chère aux franciscains, cf. : Prière devant le Crucifix de saint Damien : "Seigneur, illumine les ténèbres de mon coeur..."
  • Un jeu spéculaire : le lecteur voit le texte, transmis par l'auteur de ce ch. 17, auquel l'enfant, devenu adulte, l'a raconté ; le regard se dédouble ensuite : il voit l'enfant qui voit le saint à côté duquel est le Christ, et saint François qui devient lui-même une figure christique ; il s'agit donc ici d'une théophanie à plusieurs dimensions, spatiales et temporelles, d'ailleurs, conforme à l'esprit franciscain de contemplation, et en total accord avec le thème du miroir, qu'on trouve chez sainte Claire!
  • Enseignement franciscain : la foi par la contemplation et l'imitation, à condition que le cœur y soit disposé, ce qui est l'œuvre de l'Esprit : opus operantis.

 

Un autre point de vue

Merci au pasteur Marc Pernot, de l'Eglise réformée de Nancy d'avoir apporté une contribution à cette analyse:

"Ce qui me frappe aussi, c'est que là, Saint François n'est pas pris pour le Christ, mais comme chemin vers le Christ. Il y a une sorte de chaîne, une transmission.

  • François cherche à être en relation avec le Christ (même quand il dort, c'est pour pouvoir prier, après, dans un coeur à coeur avec Dieu).
  • L'enfant cherche Dieu aussi, et pour cela cherche à suivre François, non pour lui-même, mais pour sa sainteté, c'est à dire la force de sa relation à Dieu, de sa prière. Et ce qu'il recevra, c'est d'être lui-même en relation directe avec Dieu, en fait comme St-F l'était => François n'est pas le but, mais il a permis de mettre en relation.
  • Là encore, ce n'est pas le sommet, puisqu'il aura encore à grandir.
  • Et finalement l'enfant sera lui-même un homme qui sera bien utile, c'est à dire qu'il sera un maillon de la chaîne, et un maillon qui ne se prend pas non plus pour le Christ."