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Nouvelles du Petit Paradis en Equateur

La vie quotidienne dans le nord des Ande équatoriennes

 

Note de lecture :

La révolution en... cinq axes :
4. Révolution de l'éducation et de la santé
5. Révolution pour la dignité, la souveraineté
et l'intégration latino-américaine

Voici la quatrième et dernière note consacrée au programme d'Alianza Pais (voir "Rêve de pays, pays de rêve", "La révolution en cinq axes : révolution constitutionnelle, révolution éthique" et "La révolution en cinq axes : révolution économique et productive)".

AXE 4. REVOLUTION DE L'EDUCATION ET DE LA SANTE

Le plus grand potentiel du pays est sa population. C'est pourquoi l'éducation et la santé doivent être de la meilleure qualité possible, destinées à tous et être garanties par l'Etat comme des droits fondamentaux.

La politique sociale doit être fortement articulée à la politique économique, incluante et mobilisatrice, la fin ultime de l'action publique étant le développement humain.

Les politiques publiques sont fondées sur une éducation libératrice, attentive aux spécificités du pays et ouvertes aux courants de la pensée universelle.

La construction de la culture commence dans les foyers, les écoles et les collèges, dans les quartiers urbains, les villages et les communautés. Les institutions appelées à conduire les processus culturels le font de manière isolée, sans un plan institutionnel qui fixe les priorités, sans rapport avec nos antécédents historiques et notre diversité ethnique. Les lois établies se réfèrent à des aspects partiels du travail culturel, ce qui provoque la dispersion des activités et des ressources.

De ce fait, une politique culturelle à long terme est requise qui aura comme pierre angulaire la riche diversité culturelle - biodiversité, diversité géographique et ethnique - qui nous identifie, orientée vers la concertation et non le morcellement des entités culturelles, en prenant en compte la variété des acteurs impliqués - créateurs, interprètes, gestionnaires, journalistes, programmateurs, public, société civile, maisons de la culture, universités, comités de quartier, municipalités, conseils provinciaux -, par le biais d'une réforme de l'Etat, dégagée d'intérêts partisans conjoncturels, afin d'éviter les échecs, les manipulations et l'instabilité des institutions, en rejetant et sanctionnant les antivaleurs de la corruption, dans une ambiance de qualité de vie, d'éducation et de santé ordonnée en vue de la souveraineté et de l'intégration à la grande patrie latino-américaine.

A cet effet, les actions suivantes seront entreprises.

A. CONSTRUCTION D'UNE POLITIQUE EDUCATIVE POUR L'ERE DE LA CONNAISSANCE ET DE L'INFORMATION

Une éducation pour tous et pour toute la vie implique une réforme permanente et profonde de l'appareil éducatif, viable à la condition qu'elle s'appuie sur le développement de la pensée complexe, la recherche interdisciplinaire et l'incorporation des technologies de l'information. L'éducation constituera la pierre angulaire de l'engagement de réaliser le développement humain intégral. Il faudra en même temps rattraper les retard et les déficits éducatifs auxquels doit faire face la société équatorienne.

C'est pourquoi il faut envisager deux stratégies, une à long terme et une autre pour la durée du gouvernement.

Pour les court et moyen termes, les actions suivantes seront prioritaires.

  1. Continuer à développer une éducation de base de qualité, pour tous, gratuite, articulée aux programmes de santé, nutrition et production, en mettant l'accent sur les zones rurales et les zones urbaines marginales, dans le respect de la diversité et de l'interculturalité.
  2. Institutionnaliser l'apprentissage permanent pour les ressources humaines du système éducatif national, en soutenant la réforme scientifique et technique des institutions de formation des enseignants de niveaux universitaire ou non universitaire.
  3. Pour élever le niveau de toute la population équatorienne, on encouragera le développement de réseaux communautaires promouvant la cohésion sociale par la lecture et l'écriture.
  4. Le problème de l'inégalité dans l'accès à une éducation de qualité sera traité par l'application des six objectifs de l' " Education pour tous ", dans la perspective d'accomplir en 2015 l'engagement pris à Dakar en 2000 : améliorer la couverture et la qualité dans l'éducation initiale jusqu'à 5 ans, cycle de base de 10 ans, promouvoir l'acquisition de compétences pour les jeunes et les adolescents, articuler les sous-systèmes d'éducation scolaire et extra-scolaire, encourager la formation pour le travail productif et promouvoir l'équité de genre.
  5. Engager la réforme éducative avec une double priorité : l'éducation publique et l'éducation populaire permanente.
  6. Transformation de la gestion administrative du ministère de l'Education et de la culture [devenu Ministère de l'éducation tout court après la création du Ministère de la culture] par l'arrivée d'un personnel supérieurement formé, par la formation permanente des fonctionnaires actuels et l'institutionnalisation de systèmes de reddition de comptes qui rendent transparente pour la population la gestion réalisée.
  7. Continuer à renforcer l'éducation interculturelle, au-delà de visions ethnocentristes.
  8. Agir de manière coordonnée avec le ministère de l'Economie et des finances afin que les projets éducatifs cessent d'être des aspirations irréalisables, mettant à disposition les ressources que commande la constitution [30 % du budget général de l'Etat].
  9. Favoriser la formation pédagogique de façon à ce que l'enseignant retrouve son rôle d'intellectuel et de professionnel de l'éducation. De même, on améliorera les revenus des maîtres, en les associant aux performances éducatives. Par ailleurs, on proposera aux écoles publiques un programme de manuels scolaires et de guides d'apprentissage financés par les municipalités. La consigne est que tous les élèves reçoivent ces manuels.

Ces propositions constituent les conditions pour asseoir les bases d'un programme éducatif à long terme, c'est-à-dire les politiques qui favorisent le développement de l'éducation écologique, humaniste, scientifique et technologique, l'articulation entre les sous-systèmes d'éducation scolaire et extra-scolaire, l'intégration de l'éducation secondaire et technique à l'université, la création de la culture de la participation pour le renforcement de la démocratie, la promotion de l'innovation et de la recherche socioéducative en tant qu'ingrédient de base pour l'amélioration permanente de la qualité du système, mais en liant toujours l'acquisition des habiletés essentielles à l'amélioration de la productivité sur le marché du travail.

L'appui aux universités est fondamental, non pas pour en multiplier le nombre et en augmenter le financement, mais pour leur renforcement qualitatif et systémique. Le pays a besoin d'urgence d'un système académique offrant une structure qui encourage et mène la recherche technologique, étroitement liée aux entreprises de toutes tailles, aux diverses organisations de la société civile, au gouvernement central et aux gouvernements locaux et régionaux. Sans recherche scientifique et sans développement technologique, cette société n'a pas d'avenir.

COMMENTAIRES

Les rédacteurs se sont appuyés pour leurs propositions sur l'ancienne organisation bicéphale du ministère - éducation et culture - qui a cessé d'exister avec la création de deux ministères séparés.

Pour commencer par la culture, à part les principes généraux qui rejoignent ce qui a déjà été exprimé dans "Le pays dont nous rêvons", les objectifs et les plans du nouveau ministère de la Culture ne sont pas perceptibles. Le ministère n'a pas encore de site web et, sur le site de la présidence de la République, ne figure aucune adresse, ni téléphone. Il faut dire que la crise que traversent les institutions politiques équatoriennes ne crée pas une ambiance favorable à la discussion de projets culturels. Il faudra donc attendre que le ministre, un poète noir, qui a dirigé pendant 23 ans le secteur culturel de la Banque centrale de l'Equateur, trouve ses marques.

Il en va tout autrement de l'éducation. En effet, la première question d'une consultation, organisée par le précédent président de la République, Alfredo Palacio - dont les résultats ont été éclipsés par ceux de l'élection présidentielle -, a été acceptée à une large majorité par le peuple équatorien :
"Etes-vous d'accord que les huit politiques du Plan décennal de l'éducation, présentées dans cette consultation, soient considérées comme des politiques d'Etat prioritaires pour les investissements du secteur public ?"
OUI 67,5 % - NON 6,16 % - BLANCS 19,02 % - NULS 7,77 %

Ce Plan décennal a été proposé par le ministre de l'Education du gouvernement Palacio, ce qui lui a valu l'honneur d'être l'un des trois ministres reconduits dans le nouveau gouvernement de Rafael Correa.

Les huit politiques sont les suivantes :

  1. Universalisation de l'éducation infantile (0 - 5 ans).
  2. Universalisation de l'éducation générale de base (de la 1ère à la 10e année).
  3. Augmentation de l'immatriculation au baccalauréat jusqu'à atteindre le 75 % de la population correspondante.
  4. Eradication de l'analphabétisme et renforcement de l'éducation alternative.
  5. Amélioration de l'infrastructure physique et de l'équipement des institutions éducatives.
  6. Amélioration de la qualité et de l'équité de l'éducation et mise en oeuvre du système national d'évaluation.
  7. Revalorisation de la profession d'enseignant, du développement professionnel, des conditions de travail et de la qualité de vie.
  8. Augmentation de 0,5 % annuel de la participation du secteur éducatif dans le Produit interne brut (PIB) jusqu'à atteindre au moins 6 %.

Contrairement au Plan de gouvernement d'Alianza Pais, chacune des politiques, subdivisée en objectifs et sous-objectifs, concrets et détaillés, fait l'objet d'une budgétisation précise, déclinée sur les dix années du plan. D'autre part, l'accent est surtout mis sur les trois premiers cycles - préscolaire, primaire, secondaire - , où les besoins sont les plus criants, ainsi que sur l'amélioration de l'infrastructure éducative et de la condition enseignante.

Les annexes du plan apportent également un certain nombre d'indicateurs qui permettent de saisir objectivement la situation de l'éducation dans le pays et de la comparer à celle d'autres pays d'Amérique latine et du monde. Les objectifs généraux sont grosso modo identiques, mais l'approche du Plan décennal est plus technique et moins politique que celle du Plan de gouvernement d'Alianza Pais, d'où l'impression que le premier est plus crédible et réalisable que le second.

Malgré la déclaration de l'état d'urgence pour l'éducation et bien que l'effort de réhabilitation de l'infrastructure éducative ait déjà commencé en 2006, le 10 % environ des établissements scolaires de la Côte n'ont pas pu accueillir les élèves à la rentrée d'avril sur la Côte, tant la dégradation des bâtiments et du matériel est importante.

S'il n'y a pas de doute sur l'efficacité des mesures gouvernementales pour récupérer l'infrastructure scolaire, assurer la gratuité de l'enseignement public et des fournitures, universaliser le préscolaire et le primaire, etc., le critère de réussite du plan sera en définitive la transformation du facteur humain, la possibilité de modifier les mentalités et les comportements d'un corps enseignant dans l'ensemble - il y a naturellement des exceptions - plutôt démotivé, pédagogiquement dépassé, syndicalisé, plus intéressé par l'amélioration de sa propre condition que de celle des élèves, peu investi dans l'établissement d'une communication et d'une collaboration avec les parents d'élèves.

B. POLITIQUE DE SANTE UNIVERSELLE

Il s'agit de garantir le droit à la santé de la population, de renforcer la participation dans la construction d'une citoyenneté pour la santé et la vie, l'institutionnalisation d'ambiances et d'attitudes saines, conjointement à l'amélioration des services, des programmes et des capacités du personnel de santé.

A. Il s'agit de stimuler et de renforcer l'organisation et la participation active de la population aussi bien sur le plan de l'amélioration de l'alimentation que de la récupération de la culture alimentaire et de l'assainissement environnemental.

B. Doter de services de base et mettre sur pied une politique de santé pour tous, sur le plan préventif et curatif. Encourager un programme de production et de distribution de médicaments génériques qui devra être appliqué dans tout le système de santé. Les centres de santé et les pharmacies devraient être obligés d'offrir ces médicaments.

C. Consolider la réalisation du système national de santé en articulant tous les sous-secteurs qui interviennent dans le pays et le ministère de la Santé publique. L'élaboration des politiques d'Etat en matière de santé devra tenir compte des hétérogénéités locales et de la diversité du peuplement, en s'assurant qu'elles constituent de véritables réponses aux nécessités de santé de la population.

D. Augmenter le financement d'Etat en matière de santé publique et réduire progressivement les dépenses engagées par la population, créer des systèmes de planification, d'exécution et de contrôle adéquats des budgets de santé.

E. Reconnaissant que la santé est la résultante de multiples facteurs - sociaux, économiques, environnementaux, biologiques, génétiques -, on promouvra des schémas de travail intersectoriels et interinstitutionnels dont l'action conjointe permettra d'améliorer les conditions et la qualité de vie de la population.

F. Promouvoir un modèle d'attention intégrale et intégrée qui dépasse le modèle actuel curatif, médicalisé et médicamenteux, intégral dans la mesure où il institutionnalise et intègre la promotion de la santé, la prévention de la maladie aux actions curatives et de réhabilitation, dans la mesure où il fonctionne comme un véritable réseau qui rassemble les différents services selon leurs niveaux de complexité et de capacité résolutive, ainsi qu'en intégrant les différents types de pratiques et en récupérant les connaissances et les pratiques indigènes traditionnelles et ancestrales.

G. Etendre la couverture de santé afin d'éviter l'exclusion dont souffrent actuellement d'importants secteurs de la population. Optimiser la capacité d'accueil des services de santé et la formation de leurs personnels, garantissant des prestations de qualité, dans un climat accueillant, solidaire, universel, équitable envers les usagers.

H. Concevoir et institutionnaliser des projets et des programmes qui permettent de surmonter les sérieuses déficiences de santé de la population, en prenant en compte le profil épidémiologique du pays et des diverses régions. Diminuer le taux élevé de mortalité générale, infantile et maternelle, renforcer le contrôle et l'attention des maladies sujettes à une vigilance épidémiologique, améliorer le réseau des urgences médicales et les interventions face aux situations de catastrophes, naturelles ou non.

I. Garantir la disponibilité opportune et l'accès aux médicaments bon marché, sûrs, tout en s'assurant de leur utilisation rationnelle et en évitant une dépense exagérée et inutile, et en garantissant l'incorporation et l'usage sûr de la phytopharmacie ancestrale.

COMMENTAIRES

Dans la consultation déjà mentionnée ci-dessus, la seconde question portait sur la santé : "Etes-vous d'accord que, dans un délai de cinq mois, le Congrès national débatte et adopte des lois visant à :
a) Destiner en faveur des Equatoriens des ressources suffisantes qui garantissent la prévention et l'attention médicale de pathologies, élevant à la catégorie de politique d'Etat l'assurance universelle de santé ?
b) L'augmentation de 0,5 % annuel dans la participation de la santé en relation avec le PIB jusqu'à l'année 2012 ou jusqu'à atteindre au moins le 4 % du PIB ?"
OUI 66,09 % - NON 7,67 % - BLANCS 18,01 % - NULS 8,22 %.

La rédaction compliquée et tortueuse de la question donne l'impression que les initiateurs de la consultation n'avaient pas envie qu'elle soit acceptée par une large majorité. Pourtant, le pourcentage de oui est à peine plus bas que celui concernant l'éducation, probablement parce que la plupart des votants ont compris qu'il s'agissait d'améliorer la situation générale de la santé publique - infrastructures, couverture, gratuité, qualité des soins et accueil -, qui est désastreuse en Equateur, autant que celle de l'éducation. Pour autant que je sache, bien que les cinq mois de délai soient écoulés, le Congrès n'a rien décidé sur la suite à donner. Il semble bien que le traitement de ce thème important soit renvoyé à l'Assemblée constituante.

Le plan qu'Alianza Pais propose est à la fois succinct, complet et technique, mais en laissant malheureusement de côté la question des investissements et des coûts de fonctionnement d'un système universel de santé. Il a cependant le mérite d'insister beaucoup, malgré sa brièveté, sur le facteur humain - soignants et population -, sur la prévention, les médecines alternatives et les liens à établir avec l'hygiène et l'alimentation.

Curieusement, il n'évoque pas la dégradation des bâtiments et des équipements hospitaliers publics et la nécessité urgente de les remettre en état, ni le problème des urgences, qui tient, il est vrai, à un manque criant de personnel.

La carte de navigation du ministère de la Santé est contenue dans un plan stratégique qui ne présente pas non plus d'objectifs chiffrés, ni de prévisions budgétaires, à l'exception du système national d'assurance universelle de santé qui devrait atteindre un taux de couverture pour les quintiles I et II de la population de 88 % en 2010 et 100 % en 2015.

La déclaration de l'état d'urgence dans le secteur sanitaire permet de concentrer l'effort principal sur la création de 4500 postes de médecins et d'infirmières, afin d'améliorer l'accueil et les soins des patients dans les consultations externes, notamment en zone rurale. Un autre objectif est la prévention par des campagnes de vaccination, de déparasitage, d'éducation de la population dans les zones à risques - dengue, malaria - . Enfin, dans l'attente d'une gratuité totale, la mise sur pied d'une campagne de distribution gratuite de médicaments génériques dans les centres de santé.

Etant donné les conséquences très graves et immédiates des déficiences recensées, il est probablement difficile d'envisager une autre approche que celle que développe actuellement la titulaire du ministère : éteindre les incendies avant qu'ils ne se propagent. Elle le fait avec rigueur et un remarquable sens de l'organisation. Comme dans le secteur éducatif, le plus grand défi à relever est la transformation des attitudes et comportements du personnel soignant, que des conditions de travail difficiles ont amené à plus se préoccuper de leur propre bien-être que de celui des consultants et des patients.

C. PROTECTION SOCIALE DE LA POPULATION VULNERABLE DANS UNE PERSPECTIVE D'INCLUSION ET DE DROITS

Il faut aller au-delà de la vision de l'assistanat et, comme partie intégrale de la transformation profonde de la société, combattre la discrimination contre les femmes, les noirs, les indiens, les handicapés, les homosexuels, les lesbiennes, les transsexuels, et tous les secteurs qui ont été exclus ou marginalisés.

Une politique non discriminatoire passe par l'accès de ces groupes humains à des instances de pouvoir. Cela sera complété par des actions dans les domaines du logement, de la santé, de l'éducation.

On développera les programmes de sauvegarde des enfants de la rue, et plus généralement, l'application stricte des droits de l'enfance et de l'adolescence, selon les axes suivants : un plan décennal de politiques publiques qui comprend l'universalisation de l'éducation, de l'accès à la santé, à la protection et à la participation ; la construction d'un système décentralisé de protection intégrale de l'enfance et de l'adolescence ; la mise à disposition opportune des ressources financières pour ces projets ; la revalorisation de l'éthique, de la démocratie et de la justice.

Seront également inclus les programmes en faveur du troisième âge, qui garantiront une vieillesse digne et non solitaire.

On renforcera et élargira l'application de la loi qui sanctionne la violence contre les femmes et la famille, on stimulera le développement et l'efficacité du Commissariat de la femme et de la famille, l'amélioration des processus judiciaires, la mise à disposition de défenseurs publics gratuits en faveur des femmes qui ont été victimes de violence, l'augmentation des causes de dépénalisation de l'avortement, les politiques culturelles pour renforcer la participation des femmes et leur accès aux arts et au divertissement, ainsi que des sanctions drastiques contre tous types de discrimination.

Dans le domaine économique, on inclura le critère de genre dans l'élaboration des budgets du secteur public, on étudiera des formes de compensation du travail domestique encourageant toujours une répartition équitable des responsabilités entre les femmes et les hommes.

Le bon de développement humain, un des principaux programmes sociaux du pays et ayant la plus grande incidence en termes d'équité, doit se transformer par un effort conscient pour dépasser la pauvreté sur le plan productif et culturel. Cela implique la transformation du dit bon en un droit civil qui ne peut être subordonné à des pratiques clientélistes. Son exécution doit être accompagnée d'autres mesures de politique économique qui permettent de d'entraîner simultanément des réponses sur le plan de la production et du crédit.

Cela devra permettre de construire un cercle vertueux pour impulser le développement depuis le bas.

COMMENTAIRES

L'instance gouvernementale chargée de gérer cet aspect du plan d'Alianza Pais est le ministère du Bien-être social. Encore dans un passé récent, l'action de ce ministère était essentiellement dédiée à acheter les voix des bénéficiaires du bon de développement humain (qui s'est d'abord appelé bon de la pauvreté, puis bon solidaire ) ou à répartir cet avantage, ou d'autres qui lui étaient liés (paniers alimentaires, pelles et pioches, etc.), aux partisans du gouvernement en place.

Les choses ont commencé à changer avec le gouvernement précédent, qui a tenté de d'épurer les listes de destinataires afin de ne conserver que les véritables ayants droit. Elles vont changer encore beaucoup plus avec les perspectives qui s'offrent dans cette partie du plan, notamment le rejet de l'assistanat au profit d'une action affirmative, basée initialement sur une aide monétaire, mais évoluant vers des apports en termes de formation personnelle et professionnelle, de crédit, d'insertion sociale, culturelle et communautaire et également d'engagements des destinataires à, par exemple, envoyer régulièrement leurs enfants à l'école.

La ministre du Bien-être social est peut-être la seule des nouveaux ministres à avoir présenté, avant même d'entrer en fonction, un plan de travail intitulé "De l'assistanat et du clientélisme vers le développement social, équitable et citoyen".

En dépit de ce beau programme, le plan, dans sa première page, n'omet pas de mettre en évidence que le projet phare du ministère, le bon de développement humain, sert aussi à élargir le soutien politique au gouvernement pour l'Assemblée constituante, qui est, comme nous l'avons vu, l'un des cinq axes de la révolution proposée par Alianza Pais.

Cela a amené ce même gouvernement à reprendre l'une des pires habitudes de ses prédécesseurs, la propagande sur ses réalisations, ou prétendues telles, matraquée dans les médias. C'est ainsi qu'à propos du bon de développement humain, qui a passé de 15 à 30 USD mensuels, les spots radiophoniques ou télévisés affirment sans rougir de honte "nous doublons le bon, nous doublons le bien-être". Si une famille pouvait vivre avec 30 USD mensuels, le slogan serait acceptable, mais sachant que le panier de la pauvreté se monte à 317 USD par mois, il est scandaleusement exagéré. Avant de conclure : "La patrie appartient déjà à tous". Les auteurs auraient dû avoir la décence d'ajouter "la patrie commence à appartenir à tous" ou "un premier pas vers une patrie pour tous, il y en aura d'autres". C'est évidemment moins glorieux !

Il faut préciser que les autorités locales, provinciales, les services et les entreprises publics vantent tous ainsi leur gestion, alors même que les habitants éprouvent tous les jours leurs déficiences. Il est probable qu'ils sont tellement habitués à cette discordance qu'ils n'y prêtent plus aucune attention. Le contenu informatif des messages est souvent nul ou bas. Cette publicité mensongère constitue cependant une manne pour les finances des canaux télévisés ou des nombreuses radios privées, sans laquelle ces dernières auraient du mal à subsister.

Parenthèse fermée. Dans le site web du ministère, le plan de travail a été remplacé par une page succincte sur la planification stratégique, qui couvre le même champ que le programme d'Alianza Pais, mais de manière plus systématique, bien qu'elle ne soit non plus complétée par des objectifs chiffrés et des éléments budgétaires. Curieusement, le point qui me paraissait le plus intéressant de ce programme, le dépassement de l'assistanat, n'est plus présent comme un objectif en soi de l'action du ministère. Par contre, le développement de la capacité d'organisation et de participation de la société civile figure comme un des objectifs stratégiques, une formulation plus vague et plus générale.

D. APPUI RESOLU AUX EMIGRANTS ET A LEURS FAMILLES

Une des principales agressions du modèle économique dominant contre la population a été de lui voler son avenir. Les jeunes, les femmes et les hommes ont dû quitter le pays du fait du manque d'opportunités dans le présent et d'options limitées pour le futur.

Le plan d'action en faveur des émigrés fera partie d'une stratégie de développement à long terme, il sera impulsé et exécuté par le gouvernement central, en collaboration avec les gouvernements régionaux et les organisations sociales et économiques, la société civile et, surtout, par les émigrés eux-mêmes et leurs familles, dans les pays d'accueil et en Equateur. Les droits humains des émigrants et de leurs familles devront être pleinement reconnus comme devront l'être ceux des réfugiés et des immigrés en Equateur. La politique migratoire ne peut être basée sur une double morale, l'une exigeant la protection des droits et un traitement digne envers les émigrés équatoriens et l'autre appliquant des critères différents aux étrangers.

Cela implique une vigoureuse politique de défense de la paix sur le plan international selon laquelle les droits civils ne peuvent pas dépendre de l'une ou l'autre nationalité, mais de la condition humaine. La migration est une opportunité pour une nouvelle forme de relations internationales. Le gouvernement équatorien dénoncera avec fermeté les politiques de migration discriminatoires des pays industrialisés, la fermeture de leurs frontières, les mafias qui s'enrichissent sur le dos des émigrés, l'exploitation sexuelle qui affectent des millions de migrants.

Un des points importants de cette politique est le respect de la liberté d'émigrer, qui non seulement donne la possibilité légale de partir, mais aussi l'information sur les implications, les risques, les opportunités et les procédures qu'implique la migration.

Cette politique recherchera aussi l'élimination des causes économiques, sociales, politiques qui ont forcé l'émigration de certains. Elle combattra l'exploitation du désespoir des habitants par les usuriers et les passeurs, sans incriminer les émigrants clandestins. Cela nécessitera un changement dans la forme juridique et policière de traiter l'émigration. Plutôt que de tenter d'empêcher le départ des émigrés, il faudra construire les conditions qui rendent possible leur retour dans le pays, et en particulier la constitution d'un système financier qui mette à leur disposition des crédits d'investissement permettant leur réinstallation dans le pays.

Il est également important de mettre en lumière aussi bien les aspects positifs que négatifs de l'émigration, de voir quels types de coopération pourraient se développer entre l'Equateur et les pays qui accueillent un grand nombre d'émigrants équatoriens. Cela nécessite une étude approfondie du phénomène de la migration équatorienne.

COMMENTAIRES

Il n'est pas juste de dire que tous les Equatoriens qui ont émigré ont été obligés de le faire. Comme dans de nombreux pays pauvres du monde, les Equatoriens quittent leur patrie attirés par le mirage d'une vie plus facile et confortable dans les pays de destination : Etats-Unis, Espagne, Italie principalement. Certains d'entre eux n'hésitent pas à investir 8 ou 10.000 USD dans une équipée d'immigration clandestine, parfois au risque de leur vie, alors qu'avec la même somme, ils pourraient créer une petite entreprise en Equateur, mais cette perspective leur paraît beaucoup moins attrayante. Il est vrai par contre que le crash bancaire de 1999 et la dollarisation ont appauvri la classe moyenne, dont de nombreux ressortissants n'ont plus vu d'autre issue que celle de partir : mieux vaut être pauvre dans un pays riche que pauvre dans un pays pauvre.

Un autre sujet de controverse est le nombre des émigrés. On entend souvent prononcer le chiffre de trois millions, mais, dans une chronique documentée de El Comercio du 8 avril 2007, l'auteur arrive au chiffre de 1.400.000, sur la base de recoupement de sources fiables.

Le paradoxe est que l'Equateur n'est pas qu'un pays d'émigration, il est aussi un pays d'immigration pour de nombreux Colombiens et Péruviens, attirés par des salaires en dollars, qui paraissent pourtant misérables aux candidats équatoriens au départ.

Une des actions prioritaires du gouvernement dans ce domaine devrait être de lutter avec la même résolution contre les trafiquants d'êtres humains que celle contre les trafiquants de drogue. Alors qu'une mule peut être condamnée à 7-8 ans de prison pour quelques centaines de grammes de cocaïne, les passeurs d'émigrants sont rarement inquiétés et les peines dont ils sont théoriquement passibles sont minimes.

Enfin, l'affaire de la faillite de la compagnie aérienne Air Madrid a révélé la distance qui existe entre le discours et la réalité du nouveau gouvernement. S'il est juste de réclamer des gouvernements des pays d'accueil un traitement digne des émigrés équatoriens, le retour des Equatoriens résidant en Espagne et bloqués en Equateur, a été conduit d'une manière honteuse par les instances gouvernementales. Certes, le problème a surgi au moment du passage du témoin entre le gouvernement sortant et le gouvernement entrant. Mais, alors que le premier semblait disposé à utiliser le Fonds des migrants pour confier le retour des quelques 5000 voyageurs à des compagnies charters, le second a concentré ses efforts sur l'obtention d'une aide gratuite du gouvernement espagnol et surtout du gouvernement vénézuelien, qui a mis à disposition des avions militaires à cette fin. Il en est résulté un véritable via crucis pour les migrants, d'abord obligés de se rendre à Quito ou à Guyaquil et passer des heures, et parfois des jours, de queue pour faire valoir leur droit au retour, en étant soumis à une désorganisation éprouvante pour savoir quand ils pourraient voyager. Ayant épuisés leurs ressources, certains d'entre eux ont passé des jours entiers sur la piste de l'aéroport de Guayaquil, avec leurs bagages, mais sans ravitaillement, exposés au soleil et à la pluie, pour être sûrs d'être embarqués, d'autres ont fait trois ou quatre allers et retours entre le domicile de leur famille dans d'autres villes et l'aéroport de Guayaquil.

Je suis apparemment le seul à avoir été choqué par cette indifférence et cette négligence, et, sauf erreur de ma part, aucune autorité ne s'en est émue, mais non plus aucune association ou fondation caritative, peut-être à cause des bonnes dispositions du gouvernement espagnol, qui a décidé qu'aucun Equatorien ne perdrait son emploi à cause des retards dus à cette faillite. Alors, comme il s'agissait de "privilégiés" qui vivent en Europe et voyagent en avion, ils ont été laissés à la grâce de Dieu. Les derniers sont partis trois mois après la date prévue de leur retour.

AXE 5. REVOLUTION POUR LA DIGNITE, LA SOUVERAINETE ET L'INTEGRATION LATINO-AMERICAINE

La dignité et la souveraineté de l'Equateur doivent être défendues contre les chantages impérialistes et la soumission de ses chefs d'Etat, qui ont impliqué le pays dans des conflits et des agendas qui ne sont pas les siens, dans des processus commerciaux inégaux qui portent atteinte à la souveraineté sur ses ressources naturelles et même à son ordre juridique.

1. Appui à un nouvel ordre économique, social, politique et culturel dans le monde

L'Equateur doit sauvegarder sa souveraineté et sa dignité en matière de relations internationales. Il doit consolider la défense et la sauvegarde des droits humains en respectant et rendant opérationnels les accords nationaux et internationaux, préserver les ressources naturelles en alliance avec d'autres pays.

L'Equateur doit prendre la tête d'un mouvement international afin que les accords internationaux dont le pays est signataire s'appliquent, tels que la Convention sur la diversité biologique et le Protocole de Kyoto. Il doit définir une stratégie politique et technique d'insertion dans le commerce mondial qui permette de négocier des accords favorables pour son économie. Il ne soutiendra pas des traités ou des accords dont les effets pourraient être négatifs, non seulement du point de vue économique et commercial, mais également social, environnemental, juridique, de la sécurité alimentaire et de la souveraineté. Le peuple doit se prononcer sur ces thèmes de grande importance, qui peuvent affecter les générations actuelles et futures, tel le Traité de libre Commerce [avec les Etats-Unis, que Rafael Correa a définitivement écarté].

L'Equateur abrogera tout traité économique ou autre, qui serait contraire à l'intérêt national, il ne permettra pas l'intervention de tribunaux d'autres pays ou internationaux, qui sont partiaux, dans des problèmes internes, telles que la fiscalité, il ne tolérera pas la présence de troupes étrangères sur son territoire.

Dans le domaine pétrolier, on établira une stratégie de renégociation de tous les contrats de manière à assurer une rémunération plus juste pour une ressource non renouvelable qui appartient à tous les Equatoriens.

Dans le domaine de la souveraineté territoriale et de la sécurité extérieure, il convient d'adopter une attitude ouverte, mais ferme sur la défense de la dignité nationale. Face au conflit interne colombien, la neutralité et la non-intervention de l'Equateur dans un problème interne de la Colombie sera défendue, en concordance avec les autres pays de la région.

L'Equateur notifiera aux Etats-Unis le non-renouvellement de l'accord sur la base aérienne de Manta [qui vient à échéance en 2009]. Si la guerre en Colombie entraîne des dégâts matériels et humains, le gouvernement présentera des réclamations devant toutes les instances juridiques internationales et exigera des sanctions et des indemnisations.

Une discussion démocratique sera engagée sur l'adhésion du pays à la Convention sur la mer et conséquemment l'assujettissement à la loi internationale sous la protection des Nations Unies qui permettra de défendre ces ressources, en coopération avec les pays qui partagent le même intérêt.

Il conviendra de renforcer et de diversifier les relations bilatérales non seulement avec les pays de la région, mais avec ceux d'Asie et d'Europe, comme les relations avec les organisations internationales, en recherchant des alliances avec d'autres pays.

Les prix des produits équatoriens d'exportation devront être défendus contre les échanges économiques et écologiques inégaux.

2. Relations souveraines avec les organismes multilatéraux

Les relations économiques internationales auront comme fondement la défense de l'intérêt national et la non subordination à des politiques externes qui génèrent plus de pauvreté et de chômage. En tant que membre de ces organismes, l'Equateur utilisera leurs forums pour proposer, de manière officielle et décidée, des thèmes qui contribuent à la création d'un nouvel ordre économique mondial, basé sur la solidarité et la libre détermination des peuples. Les organismes de crédit seront les bienvenus dans la mesure où ils seront disposés à impulser, en collaboration avec l'Etat, des projets d'investissements qui favorisent le développement de la compétitivité locale ou nationale.

3. Une vraie intégration latino-américaine

Le rêve du Libérateur [Simon Bolivar] ne peut être vain. Tous les latino-américains sont bolivariens. L'Amérique latine d'aujourd'hui fait souffler des vents nouveaux et rénovateurs. Il est temps qu'elle dépasse des visées erronées telles que créer de grands marchés, de grands consommateurs, car ce qui est requis, ce sont des citoyens engagés dans la construction de la grande nation latino-américaine, vigoureuse et solidaire, pour affronter les défis de la globalisation et pouvoir marcher avec sa propre identité et sa propre force.

L'intégration économique, politique et sociale de la région doit avancer pour permettre la défense de nos intérêts communs dans le concert politique mondial. La création du Fonds latino-américain pour les finances et le développement, ainsi que la constitution d'entreprises latino-américaines d'hydrocarbures, d'électricité, de gaz et de télécommunications.

Il faudra promouvoir l'élection directe du Parlement latino-américain (Parlatino) dans chacun des pays, appuyer l'adhésion de l'Equateur aux organisations latino-américaines créées pour favoriser le développement, la coordination et la solidarité, telles que la Communauté sud-américaine des nations, la Communauté andine des nations (CAN), le Mercosur, le Traité de coopération amazonien. Ces organismes, dont beaucoup d'entre eux sont en crise, telle la CAN, à cause des traités de libre commerce avec les Etats-Unis, doivent être repensés. Il ne s'agit pas de défendre les structures bureaucratisées actuelles et les mêmes pratiques d'intégration qui ont donné la priorité au commercial en laissant de côté le social, le culturel, l'environnemental et surtout le politique. Il convient de mettre en avant l'objectif de l'unité et de l'intégration latino-américaines à partir de la convergence des politiques économiques et sociales, de la complémentarité des appareils productifs et de la solidarité régionale. Il faudrait, par exemple, stimuler les accords entre les entreprises publiques de la région, favoriser des mécanismes de négociation qui reconnaissent la réalité d'un développement inégal et les relations solidaires entre les nations plutôt que présupposer une égalité fictive.

La remise en question du Traité de libre commerce avec les Etats-Unis ne doit pas fermer la voie à d'autres traités bi- ou multilatéraux. L'Equateur doit multiplier ses efforts pour s'insérer de manière active et adroite dans le monde, en établissant des liens avec le plus grand nombre d'économies, telles la Chine, l'Inde, l'Union Européenne, et aussi les Etats-Unis, en diversifiant les exportations, en évitant de dépendre d'un petit nombre de marchés, et surtout pas un seul comme actuellement [les Etats-Unis]. Le commerce extérieur doit être orienté vers une logique sociale et environnementale, et pas uniquement vers une logique d'accumulation de capital et il ne doit pas mettre en danger la souveraineté alimentaire et énergétique et l'emploi.

Il faut fortifier l'Etat en tant qu'acteur du développement. Même la CEPAL [Commission économique (des Nations unies) pour l'Amérique latine] considère qu'il est temps de diminuer le préjugé contre l'investissement public. Il faut moderniser les marchés pour en faire des espaces de construction sociale qui doivent être contrôlés et réglementés par la société et l'Etat. Il faut aussi établir d'urgence des règles claires pour tous les investisseurs nationaux et étrangers et l'Etat. La sécurité juridique doit être pour tous, pas seulement pour les capitaux étrangers, y compris pour les entreprises publiques. L'intégration de la sous-région andine ne peut être conçue que comme une possibilité de rechercher un rapprochement avec l'économie nord-américaine, dans un processus de restructuration géopolitique complexe, dont le résultat n'est pas clair. L'intégration andine doit viser à des objectifs plus amples et plus profonds dans un effort concerté pour le sous-développement et renforcer la démocratie. On pourrait envisager, comme en Europe, un rapprochement réel des politiques économiques et le remplacement des monnaies nationales comme une stratégie de cession volontaire d'une partie des souverainetés nationales en faveur de la construction d'une souveraineté plus large.

Il convient de rendre possible l'établissement et l'application de schémas d'accumulation et de reproduction nationaux et andins, qui s'appuient sur une plus grande participation des citoyens et qui excluent des régimes autoritaires et répressifs, qui dépassent les dogmes et les contradictions néolibérales et débouchent sur des transformations économiques, sociales et politiques que chaque société requiert.

Sur le plan de développement territorial régional, particulièrement dans les régions frontières, les effets de l'intégration peuvent provoquer des transformations profondes dans des groupes humains qui ont été les principales victimes de conflits répétés et d'oubli séculaire de la part des pouvoirs centraux.

COMMENTAIRES

Je trouve tout à fait recevable la revendication concernant la dignité et la souveraineté de l'Equateur, comme de tous les pays du monde, notamment les plus petits. Cependant, elle ne sera véritablement justifiée et crédible sur le plan international que quand le nouveau gouvernement aura résolu les graves problèmes internes en matière d'équité, de respect des droits fondamentaux des citoyens et de protection de l'environnement. Pour le moment, le gouvernement a surtout fait part d'intentions qui ne se sont pas concrétisées dans de réels changements, dont certains devront attendre la fin des travaux de l'Assemblée constituante.

Sur le plan de l'intégration sud-américaine, quelques pas ont été faits où l'Equateur a joué et va jouer un rôle actif, principalement la création du secrétariat exécutif de l'Unasur (Union des nations sud-américaines), qui sera dirigé par un ex-président de la République, Rodrigo Borja, et s'installera à Quito, ainsi que des projets plus concrets tels que la Banque du sud. Les principaux objectifs définis par le secrétaire sont : impulser la coopération sud-sud, corriger les assymétries produites par la globalisation dans la région et former un front d'organisation et de défense des pays sud-américains.

Au cours des premières semaines du guvernement, il semblait que l'Equateur allait participer activement à ce que j'appellerai le front bolivarien, c'est-à-dire rejoindre l'axe existant entre le Venezuela et la Bolivie. Un changement de cap s'est fait sentir quand l'Equateur s'est aussi tourné vers des pays progressistes modérés tels que le Brésil, l'Argentine et le Chili. Il m'est difficile de dire si cette inflexion est, premièrement, durable, et si elle est due à facteurs extérieurs ou intérieurs, parmi lesquels le désir de ne pas provoquer outre mesure les Etats-Unis et l'hostilité d'une partie de l'opinion publique à un alignement trop marqué avec Hugo Chavez, déjà exprimée lors de la campagne électorale, et pouvant compromettre l'objectif de Rafael Correa d'obtenir la majorité absolue à l'Assemblée constituante.

Un des problèmes internationaux qui affecte le plus l'Equateur est la question délicate des rapports avec la Colombie, qui se sont beaucoup tendus depuis qu'a commencé l'éradication par voie aérienne des plantations de coca situées à proximité de la frontière commune. Pendant longtemps, les gouvernements colombiens ont estimé, probablement avec raison, que l'Equateur fonctionnait comme un refuge pour la guérilla. Après la suppression de la zone de distension par le gouvernement Pastrana, les Farc se sont repliées vers les départements du sud de la Colombie. A la suite de la signature du traité de paix avec le Pérou en 1999, l'armée équatorienne a été capable de mobiliser des contingents importants pour surveiller la frontière nord et les incursions de la guérilla ont été sérieusement limitées. Pour autant les incidents frontaliers n'ont pas cessé. A l'arrivée du gouvernement de Rafael Correa, souverainiste et nationaliste, la tolérance vis-à-vis du grand voisin du nord a pris fin. Cela fait de nombreux mois que l'ambassadeur équatorien à Bogota a été rappelé à Quito. L'Equateur a porté plainte contre la Colombie auprès de la Cour internationale de La Haye à cause des fumigations aériennes. Chaque incident frontalier fait l'objet d'une protestation auprès du gouvernement Uribe, dont l'attitude arrogante semble se modérer afin de calmer le jeu sur sa frontière sud. Un voisin incommode suffit (il s'agit bien sûr de Hugo Chavez).

Enfin, concernant les relations avec les Etats-Unis, le principal client et fournisseur de l'Equateur, le nouveau gouvernement a assumé une attitude de confrontation - qui avait déjà été amorcée dans le précédent avec l'annulation du contrat avec la compagnie pétrolière Oxy et l'arrêt des négociations du Traité de libre commerce - qui se traduit par le non renouvellement de l'accord sur la location de la base aérienne de Manta à l'armée états-unienne, le refus de poursuivre une collaboration avec le FMI et la Banque mondiale, le rapprochement déjà évoqué avec le régime de Chavez. En dépit de ce qui pourrait être considéré comme une forme d'hostilité envers les Etats-Unis, les réactions du gouvernement américain ont été jusqu'à présent modérées, d'une part grâce à l'attitude conciliante de l'ambassadrice à Quito et d'autre part au changement de majorité au Congrès. Il reste à voir si, à moyen terme, cette position pourra être maintenue sans mettre en danger la situation économique du pays.

Ce n'est à peine qu'un premier pas

Cette proposition est perfectible. Beaucoup d'autres thèmes doivent être abordés. La tâche est immense, et de ce fait, il faut ouvrir la porte à d'autres compagnons de route, qui, s'ils n'adoptent pas toutes nos propositions, partagent nos rêves.

Il s'agit de marquer le pas dans une même direction, celle d'une société plus juste, plus équitable, plus libre.

Il faut croire de nouveau, pas simplement dans un leader, dans un mouvement ou un parti politique, dans une alliance pour nécessaire qu'elle soit, mais en chacun de nous. La plus grande richesse de l'Equateur, c'est nous-mêmes, les gens, décidés, unis, l'avenir est entre nos mains. Nous sommes tous PAYS, nous aimons tous cette patrie, fière et souveraine que nous méritons et qui, par droit historique, nous appartient.

COMMENTAIRES

L'évolution de ces cinq premiers mois laisse au contraire entrevoir que Rafael Correa, le nouveau président, s'affirme toujours plus, non comme un facilitateur encourageant la participation de tous à un projet collectif, mais comme un leader charismatique exigeant de tous l'adhésion à sa vision.

LES LACUNES DU PLAN

Elles sont au nombre de quatre et concernent des domaines vitaux pour la sécurité des citoyens et du pays : les forces armées, la police, la justice, les prisons. Ces omissions sont d'autant plus surprenantes que toutes ces institutions sont exposées à la corruption et généralement peu efficientes. De ce fait, elles contribuent dans une large mesure à l'injustice sociale et aux inégalités que le plan se propose de réduire.

Etant donné l'importance de ces domaines, je n'irai pas plus loin dans le commentaire, ni pour tenter d'expliquer ces lacunes, ni pour les pallier. Les débats de l'Assemblée constituante me permettront d'y revenir en temps voulu.

Le 2 juin 2007


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